Ce 15 février est la journée mondiale des cancers de l'enfant. Véronique Lorin a perdu sa fille en 2023. Elle était atteinte d'une tumeur au cerveau. Véronique espère aujourd'hui que la recherche avance. Mais pour cela, il faut des crédits suffisants.
Par Céline Dupeyrat
Publié le 15 févr. 2025 à 06:05
Les premiers symptômes se manifestent en 2019. Clarisse a 17 ans. Elle est en terminale. La jeune fille est au lycée en pension. Ce jour-là, elle se sent mal, vomit. Et prévient sa mère.
Moi, je pensais à une gastro, bref, rien de grave. Elle n'a jamais voulu que j'aille la chercher au lycée. Ça s'est reproduit une deuxième fois, trois semaines après, dans la douche
Véronique Lorin
Mère de Clarisse
Le médecin à l'époque pense déjà à un problème neurologique. "Il m'avait dit, si ça recommence, on fera un électroencéphalogramme. Et puis ça a recommencé, et au lieu d'aller aux urgences, parce qu'on n'a pas pour habitude non plus d'aller aux urgences, on a écourté nos vacances, on est revenu voir notre généraliste, qui m'a dit, écoute Véro, il faut que tu trouves un scanner", raconte Véronique.
Elle passe l'examen, le radiologue évoque "une masse".
Il faut aller voir plus loin avec une IRM dans la foulée, "on a vu un neurochirurgien dans la foulée, il lui a fait répéter trois fois son âge. Elle avait 17 ans, et il lui a dit, bon, il faut qu'on t'opère", poursuit Véronique Lorin.
"Comme c'était l'année du bac, nous, on a pensé à une opération pendant les vacances scolaires. Il lui a dit, non, non, je t'opère la semaine prochaine. J'ai un créneau le 2 mai, je t'opère le 2 mai", précise-t-elle.
Le diagnostic tombe, cruel, la fille de Véronique est atteinte d'une tumeur cérébrale.
Quelque part, dans notre malheur, elle a eu la chance de se faire opérer. Et puis après un premier protocole, les cellules se sont redéveloppées, donc elle a été opérée deux fois
Véronique
La voix de cette mère dont la vie a brutalement basculé tremble lorsqu'elle évoque le parcours douloureux de son enfant.
"En fait, je dis que c'est une maladie un peu invisible parce que tout le temps de ses traitements, Clarisse a fait plein de traitements, mais ça ne se voyait pas en fait, sa vie était la même. En tout cas, elle, elle a décidé que sa vie n'allait pas changer", raconte-t-elle, étranglée par de délicats sanglots.
Clarisse continue le hand "avec une brassière de boxeuse adaptée". "Elle fait même un saut en parachute", sourit Véronique.
"Elle, s'occupait de sa vie, c'est-à-dire sortir, ses amis, évidemment, quand l'oncologue lui dit tu ne bois plus d'alcool, il y avait plein de petites restrictions, parce que c'est une maladie qui fatigue énormément. Il fallait qu'elle fasse des siestes, mais ça ne l'a jamais empêchée, même de trouver un stage, parce qu'elle était en licence pro, d'ailleurs, elle travaillait à l'EFS, à l'établissement français du sang. C'était drôle, parce qu'elle s'occupait de la logistique, et en même temps, à cette période-là, elle recevait des plaquettes. Donc, elle me disait, c'est trop cool, je peux suivre le truc du début jusqu'à la fin. Et puis elle avait une bonne humeur, incroyable", souffle la maman admirative.
Clarisse Lorin • © France 3 Pays de la Loire
"En septembre 2023, on est arrivés au bout de tous les traitements. Et donc progressivement, comme c'était sur le lobe temporal gauche, tout le côté droit s'est paralysé", détaille-t-elle.
Elle avait toute sa tête, elle était très lucide sur ce qui lui arrivait, mais elle n'arrivait plus à marcher, elle avait des difficultés à déglutir, elle n'arrivait plus à écrire, elle ne voyait plus
Véronique
"Le 12 décembre, Clarisse est partie, elle avait 22 ans", murmure Véronique Lorin en s'effondrant.
C'était en 2023. "Mais elle a eu une belle vie", se rassure la maman.
"Quand on diagnostique cette maladie, on est perdu, enfin, on part perdant quoi. Personne ne va se battre. On est perdant parce qu'il n'y a pas de traitement. Et comme ça ne touche pas un assez de monde, on ne va pas investir l'argent", constate-t-elle.
Financer la recherche est pourtant fondamentale pour lutter contre les cancers infantiles. C'est pourquoi l'association Des étoiles dans la mer se mobilise pleinement. 30 000 euros et déjà le quatrième don fait à la société GlioCure, une de développement de médicaments spécialisés en neuro-oncologie dont le candidat médicament le plus avancé, GCà1.1, est prometteur dans le traitement des tumeurs du système nerveux de l'enfant et de l'adolescent
Aujourd'hui, les chercheurs espèrent redonner espoir aux malades avec un traitement plus efficace.
"On va tester notre produit. Soit, on est meilleur que le traitement standard ou si on peut avoir des effets de synergie avec ce traitement standard. Puisque aujourd'hui, ce traitement ne permet de traiter grosso modo que la moitié des patients, et ce, sur un laps de temps relativement court, puisqu'en fait, il y a systématiquement récidive et malheureusement le décès des patients au bout de quelques mois", précise Louis-Marie Bachelot, président co-fondateur de GlioCure.
Véronique aujourd'hui soutient l'association Des étoiles dans la mer.
La recherche sert à tous les cancers, donc forcément ça ruisselle pour tous les cancers, pédiatriques ou pas
Véronique Lorin
Mère de Clarisse
Un temps critiqué pour avoir voulu raboter les financements, le gouvernement a annoncé injecter 15 millions d'euros supplémentaires au budget sur la recherche dédiée à la lutte contre les cancers pédiatriques.
"Je comprends qu'ils aient des budgets à gérer, mais franchement, ce n'est vraiment pas dans la santé qu'il faut taper. L'éducation, la santé, ce sont des priorités. Moi, ça me dépasse, parce que je suis touchée, mais quand bien même, avec un peu d'empathie, tout le monde trouve que c'est primordial, surtout pour les enfants. C'est terrible de voir son enfant mourir. C'est terrible", conclut Véronique.
Avec Laura Striano